Le Panthéon, le temple de tous les défis

Voulu par Louis XV pour célébrer sainte-Geneviève, édifié par l’architecte Jacques-Germain Soufflot pour rivaliser avec Saint-Pierre de Rome, ce sanctuaire est devenu par un clin d’œil de l’histoire, un temple laïque voué aux grands hommes de la France. Aujourd’hui en danger, il est l’objet de travaux exceptionnels.

On peut passer tous les jours devant le Panthéon sans avoir l’idée de le visiter. Trop grand, trop froid, trop solennel sans doute. Intimidant, sûrement. Et voilà qu’aujourd’hui, le sanctuaire bâti par Soufflot, le temple laïc à la gloire de nos grands hommes voulu par la République, subit des travaux colossaux. Oui le Panthéon est fragile, et cette fragilité le rend soudain plus accessible. Enveloppé dans une immense bâche décorée de portraits et œuvres de l’artiste JR, le dôme a toujours fière allure.

L’entrée de la grande nef est impressionnante, marbre à profusion, colonnes et chapiteaux corinthiens, statues monumentales, tout est fait pour que l’homme se sente moucheron… Haute de 82 mètres, la coupole – en réalité trois superposées – accentue cette impression de petitesse et d’écrasement. Une sensation provisoirement tempérée par d’autres bâches de JR, que l’on retrouve également au sol : les 4 160 portraits de son installation « Au Panthéon » apportent un brin d’humanité bienvenu dans cet océan de marbres et de dorures. Déception : la pendule de Foucault, qui occupait le centre de l’édifice n’est plus visible pendant les travaux.

Commandées à partir de 1874 par le directeur des Beaux-Arts, les peintures ornant les murs sont une glorification des valeurs de la France monarchique : Clovis, Charlemagne, Saint Louis, ils sont tous là immortalisés par Cabanel ou Puvis de Chavannes. Le style délicieusement pompier, rappelle les vieux livres d’histoire.

Ambiance plus intime dans la crypte. De part et d’autre d’une artère, des allées plus petites mènent aux tombeaux. Un plan à l’entrée dresse la liste des 73 grands hommes enterrés ici : Voltaire, Hugo, Zola, Gambetta, Dumas (père), Malraux, Jaurès… Des femmes ? Oui, deux : marie Curie, avec son époux Pierre et Sophie Berthelot, inhumée avec son chimiste e mari, Marcellin Berthelot. Une pistonnée…

En revanche, des généraux et barons de l’Empire, il y en a plein tout comme des illustres inconnus. Parmi eux, un certain Jean-Baptiste Bévière, mort en 1807, présenté comme le doyen des notaires de Paris. Pourquoi lui ? Il rédigea le serment du Jeu de Paume, tout s’explique !

Mais Girolamo-Luigi Durazzo? Dernier doge de Gênes, il se mit au service de Napoléon, qui le consacra comte d’Empire. Visiblement, à une certaine époque, il n’était pas si difficile que cela d’entrer au Panthéon, si on évoluait dans les bons cercles…

D’autres sépultures nous consolent : Jean Moulin, Victor Schloercher, Félix Eboué. Étonnant, celle d’André Malraux est veillée par une statue de chat noir égyptien. En 1996, lorsque sa dépouille fut exposée pendant une nuit entière, comme c’est la coutume pour tous les « panthéonisés », sa famille demanda que cette statue qu’il aimait tant veille à ses côtés. Désormais, c’est pour l’éternité.